http://www.oummahgetupstandup.com Un réveillon macabre  

Oeuvres littéraires: Un réveillon macabre

 

 


Il arrive que je fasse des rêves qui me soie source d'inspiration. La plupart du temps, je ne retiens que quelques éléments intéressants, et l'imagination fait le reste, recette dans laquelle interviennent une pincée d'humour et une grosse cuillerée de préoccupations latentes.

Ici, cependant, je n'ai pratiquement qu'à transcrire, et -encore plus rare- cela tient debout ! Je devrais me faire éditer au Canada, me déclarer 'chamane' et transcrire mes textes en wallon, langue très appréciée là-bas, paraît-il. Succès garanti, non ?

* * *

Pour planter le décor, en voici les quelques éléments: Je suis en train de me promener un soir de Saint-Sylvestre, devant une demeure assez cossue, sans être prétentieuse. Il fait presque nuit. Le temps est nuageux, assez froid, et la pleine lune se laisse carresser par les nuages.

Je ne me souviens guère des pensées qui me traversent la tête à ce moment-là, excepté que j'ai la condition d'une sorte de domestique, majordome d'un docteur de campagne.

Mon maître a laissé plusieurs lampes allumées, et termine probablement quelques dossiers, avant d'aller se coucher.

La maison -quelque part en Ardennes- est isolée du village, une route à peine macadamisée aboutit en cul-de-sac devant la maison, puis une petite ruelle bordée de hauts murs de briques rouges aboutit dans le fond à un cimetière.

Du fond de cette ruelle, j'entends un brouhaha, un concert de voix excitées qui me pousse, par curiosité, à prendre cette direction. Je marche une cinquantaine de mètres, et distingue, dans une semi-obscurité, un attroupement de personnes, certaines debout, d'autres assises. Je m'avance, et je m'informe de ce qui se passe, car, probablement, il s'agit de de fêtards parti à la rescousse de quelque ivrogne, qu'il faudra probablement secourir pour éviter un décès

"Nous venons pour demander réparation!", me dit-on.

"Ah bon, à qui ça ?"

"Au docteur X..".

Je commence à m'inquiéter de la situation, car ce docteur est précisément la personne dont je suis le majordome, et parcourant le cimetière du regard, je m'aperçois avec un début d'effroi, que ces personnes sont rejointes par de nouveaux arrivants, qui sortent...des tombes, avec moults grincements sinistres de pierres frottées l'une contre l'autre.

Je fais demi-tour sans demander mon reste, et m'éloigne de plus en plus vite, pour me mettre à courir à perdre haleine, jusqu'à la porte d'entrée de la maison du Docteur X, que j'ouvre et referme à toute volée. Derrière, moi, une galopade a confirmé que j'avais été bien inspiré de rejoindre les lieux.

J'ai à peine fermé les volets, la porte de derrière, et tous les points d'accès possible, prenant à peine le temps de répondre au Docteur, étonné de mon curieux manège, que des coups tambourinent à la porte et aux fenêtres, suivis d'imprécations diverses et surperposées.

"Que signifie ceci ?"

"Je ne sais pas, aucune idée, des voyoux sans doute, mais une chose est sûre: J'en ai vu plus d'une dizaine sortir des tombes, et ils n'avaient pas une allure engageante..."

"Appelle imédiatement le poste de police. Ceci est intolérable, même un soir de réveillon !"

J'ai à peine décroché le combiné pour former un numéro de téléphone, que plusieurs volets se fracassent, et que des fenêtres volent en éclats...De tous les côtés, les intrus font irruption, nous acculant moi contre un mur, et mon maître contre un armoire encastrée le long d'un escalier

"Réparation, nous voulons réparation !", Crient les intrus à tue-tête.

"Mais que voulez-vous à la fin ?"

"Nous voulons l'argent, l'argent du sang!", s'écrient-t'ils de plus belle

Mon maître se prépare à refuser (il est très têtu), quand une très belle femme à demi-nue s'avance, la peau jaunâtre et le corps en sueur.

"Moi je ne viens pas te demander réparation, au contraire, je profite de l'aubaine pour te remercier, car tu m'a sauvé, un jour, de la peste..."

Et elle aggripe le Docteur, puis l'embrasse goulûment. L'étreinte dure assez longement, le pauvre étant maintenu par les autres. Puis la femme retire ses bras, et s'éloigne à reculons.

Le calme retombe, et seul quelques chuchotements s'élèvent encore, suivis parfois de quelques fou-rires vite réprimés.

Je m'empresse d'intervenir et interpelle le maître de la maison: "Ce que cette femme vient de dire me semble exact. Vos ascendants m'ont déjà parlé d'une histoire de ce genre, au siècle passé, au sujet d'un de vos aïeuls, lui-même médecin. Mais ce n'est pas tout. Avez-vous vu leurs vêtements, ils sont obsolètes, parfois déchirés, les hommes sont tous barbus, et leurs ongles si longs !"

Je vois alors le visage de mon maître virer du rouge de la colère à un teint blafard, puis ces traits se décomposer, car, tous deux, nous nous rendons compte que nous ne sommes entourés que de morts...

Il répond alors: "D'accord, je vais vous laisser, ce pour quoi vous êtes venus".

On le lâche, il se retourne, ouvre une armoire, et en extrait un coffre. Ensuite, il distribue des pièces d'or aux plus proches, lançant le reste au autres, personne par personne.

Je vois même voler dans les airs en tournoyant, ma foi, un pesant cruxifix en or de la taille d'une main, réceptionné avidement par un mort plus adroit que les autres.

Les morts semblent contents et vident les lieux petit à petit.

Ils n'ont probablement pas le temps d'aller bien loin, car ceux qui avaient pris place dans des fauteuils, prenant patience que la place se dégage, se désagrègent à toute vitesse, retombant en ossements, vêtements moisis et poussière, sous nos yeux éberlués...

Bon, je ne me souviens pas du reste du rêve, mais mes avis sont, que l'aspirateur et la brouette ont dû servir une grande partie de la nuit, et que l'or, dispersé un peu partout dans la maison et la ruelle, s'est vite retrouvé au cimetière, au fond de la tombe la plus imposante, de peur de les voir tous revenir un jour...Ffffouh !

Contexte: J'ai un grand-père paternel, aide-médecin, qui, juste avant la guerre, fut condamné par les autorités coloniales pour avoir cassé le bras d'un noir, lors d'une dispute d'ivrognes. Il ne reparut qu'en Belgique, juste après l'effondrement du IIIème Reich. Je subhodore que ces quelques années passées dans la clandestinité, ne sont pas très nettes...et qu'il a eu des comptes à rendre, non pas aux autorités, mais plutôt à des personnes de son entourage, ou de sa race, bien plus tard. Sur la fin de sa vie, il émargeait à la CPAS, et mon père m'interdisait de le voir...On l'a trouvé mort dans un fossé, un matin de grand froid, à ce qu'on m'a rapporté.

Interprétation: (rêve décrypté à l'aide du langage du coeur)

- Le majordome: c'est mon esprit avec mon intelligence.

- Le docteur: c'est mon âme, qui est le patron de mon intelligence.

- La maison que j'ai vu, c'est mon corps. (de la plasticine, de l'argile, quoi, ce que les vivants nous sommes au final)

- Les morts qui demandaient l'argent du sang: des proches de personnes qui sont décédées, à cause de mes prières. Ces proches ne sont que des morts-vivants à cause de leur intérêt pour le monde matériel: ils obtiendront une compensation, et juste après, rejoindront définitivement le monde des morts en abandonnant la compensation reçue à l'endroit de leur décès..

 
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